On ne le répétera jamais assez, l’animal est, depuis 2015, devenu aux yeux du code civil un « être vivant doué de sensibilité »[1]. Cela fait donc cinq ans que l’animal a été extrait, au sein du code civil, de la catégorie juridique des biens. L’adoption de l’amendement Glavany[2] avait alors divisé la doctrine en deux camps irréconciliables : les optimistes et les pessimistes.
Là où les optimistes estimaient qu’un « grand pas de plus vers la personnalité juridique des animaux »[3] avait été franchi, les éternels pessimistes allaient jusqu’à parler de « réforme cosmétique »[4].
Pour distinguer entre réalité et crainte ou espérance, il suffit de s’interroger : la réforme de 2015 a-t-elle eu un impact concret pour l’animal ? L’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales nous offre un début de réponse au travers de sa note n°48, publiée en juillet 2020.
D’après cette note, le procureur déciderait plus souvent de poursuivre pénalement l’auteur d’une infraction commise à l’encontre d’un animal domestique, apprivoisé ou captif, comparaison faite avec l’avant 2015. Les mises en cause ont en effet augmenté de 54% entre 2016 et 2018 en matière d’abandons, et de 23% en matière de maltraitance animale[5].
Plus globalement, le nombre de mises en cause pour des faits de maltraitance et abandon d’un animal domestique a connu une hausse de 29% sur la période étudiée.
Ces chiffres, disponibles ici, confirment l’utilité de l’adoption de l’Amendement Glavany, et son impact sur la vie judiciaire. Les juges se saisissent de plus en plus de questions liées à l’animal, et prononcent des peines plus fortes. « Entre 2007[6] et 2017, le nombre de condamnations a augmenté […] de 57%. Cette hausse a été particulièrement forte à partir de 2015, date à laquelle les animaux ont été reconnus comme des êtres vivants doués de sensibilité dans le code civil (art. 515-14) »[7].
Tout cela n’est possible que grâce à une prise de conscience générale et globale, car le droit n’est que le reflet de la société[8]. Le travail des associations de protection animale, toujours plus impliquées, est essentiel.
[1] C. civ., art. 515-14
[2] Amendement soutenu par M. Jean GLAVANY, ayant conduit à l’insertion dans le code civil de l’article 515-14 (cf. [1])
[3] J.-P. MARGUENAUD, L’entrée en vigueur de l’ « Amendement Glavany » : un grand pas de plus vers la personnalité juridique des animaux, RSDA 2014/2, p. 15.
[5] « Le terme maltraitance animale utilisé dans cette note indique un regroupement d’infractions issues de la nomenclature Natinf (nature d’infraction) élaborée par le ministère de la Justice et utilisée pour qualifier juridiquement les infractions. Cette catégorie inclut les mauvais traitements par une personne morale ou un exploitant, les sévices de nature sexuelle, et les sévices graves ou autre acte de cruauté commis envers les animaux domestiques, apprivoisés ou captifs. » (Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, note n°48, 2 juil. 2020)
[6] Année suivant l’adoption de l’article 521-1 du code pénal
[7] Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, note n°48, 2 juil. 2020, p.4
[8] J. RINGELHEIM : Droit, contexte et changement social, Revue interdisciplinaire d’études juridiques, 2013/1, volume 70, pp. 157 à 163